Giedrė Pranaitytė, Aurelija Leonavičienė
Le Centre universitaire des Pays Francophones de l’Université Vytautas Magnus se joint au premier festival international d’écrivains et de livres « Kaunas Literature Week » qui a eu lieu entre les 20 et 23 mai 2021. Dans une tentative de couvrir les contextes littéraires de plusieurs continents, Le Centre universitaire des Pays Francophones cherche à rendre la société lituanienne familière avec la littérature francophone de France, de Belgique, de Suisse, de Luxembourg, des pays de l’Afrique, du Canada, du Vietnam et d’autres pays. Cette année, les organisateurs ont apporté un nouveau message culturel : le dimanche du 23 mai, il y a eu une rencontre avec Nathalie Ronvaux, poète, dramaturge, romaniste luxembourgeoise. L’évènement à distance (https://us02web.zoom.us/j/85935381207) a été dirigé par la théâtrologue et l’écrivain Ina Pukelytė, dont le dernier roman « Panelės iš Laisvės alėjos » est rempli de l’esprit multiculturel et multilingue de Kaunas à l’époque de fonctionner comme un capital temporaire de Lituanie.
Nathalie Ronvaux est née à Luxembourg en 1977. Elle écrit des recueils de poèmes, des pièces de théâtre mais aussi de la prose et des articles pour des journaux et des magazines. En 2010, elle a reçu le prix d’encouragement de la Fondation Servais pour son manuscrit intitulé « Vignes et louves ». Puis en 2013, Nathalie Ronvaux a reçu le premier prix du Concours littéraire national pour sa pièce « La vérité m’appartient ». En 2015, Nathalie Ronvaux a également été nominée pour le prix « New Voices of Europe ». De plus, elle a été nommée femme luxembourgeoise de l’année par le journal « Le Jeudi ». En 2018, Nathalie Ronvaux a remporté le Coup de cœur du jury au Lëtzebuerger Buchpräis pour son œuvre en prose « Subridere. Un aller simple ».
Son dernier roman intitulé « Le Chesterfield du cinquième » (2021) se concentre sur l’histoire de l’amitié entre un homme excentrique assez âgé et son jeune voisin, soulignant la fragilité de la vie et l’importance des moments qui passent très vite dans la vie quotidienne.
Nous vous proposons une interview avec Nathalie Ronvaux. Le texte de l’interview a été préparé par dr. Giedrė Pranaitytė, la coordinatrice du Centre universitaire des Pays Francophones de l’Université Vytautas Magnus.
Giedrė Pranaitytė : Dans vos discours publics, vous insistez sur l’importance du multilinguisme pour l’œuvre d’un écrivain. Qu’est-ce qui a inspiré votre amour du mot, de la dramaturgie et de la poésie ? Pourquoi avez-vous choisi le chemin de l’écrivain ?
Nathalie Ronvaux : J’aime les histoires et j’aime les mots. Un seul mot peut déjà à lui seul raconter une ou des histoires. S’attarder sur la signification d’un mot, chercher celui qui aura toute sa place et donnera sens en provoquant une image, une émotion est une exploration passionnante.
Ce chemin de l’écrivain ou davantage de l’écriture, je ne l’ai pas vraiment choisi. Il est venu à moi ou était déjà là. Mais avant de l’emprunter, il m’a d’abord fallu visiter d’autres sentiers. Quand j’ai trouvé le chemin de l’écriture ou plutôt lorsque je me suis aperçue qu’il y en avait un, je m’y suis attardée. J’avais la sensation d’être chez moi.
Au Luxembourg, le multilinguisme est un exercice au quotidien et j’aime penser que cette richesse questionne ma pratique de l’écriture et mon mode de pensée. Concernant ma passion pour le théâtre, elle remonte à l’âge de l’adolescence. Je n’avais pas cœur à le quitter et j’ai dû me frotter à plusieurs métiers de la scène (cours d’art dramatique, chargé de production, assistanat à la mise en scène, mise en scène) avant de trouver ma place !
La poésie est pour moi un refuge, une sorte de port d’attache et de havre que je souhaiterais habiter plus souvent.
Giedrė Pranaitytė : Pourquoi est-il important pour vous de créer des œuvres littéraires de genres différents ?
Nathalie Ronvaux : J’aime expérimenter, repousser les/mes limites ou du moins tenter de les repousser. Et j’aime aussi utiliser différents outils, essayer de ne pas toujours reproduire les mêmes structures.
Giedrė Pranaitytė : Qu’est-ce qui vous a inspiré pour écrire le nouveau roman Le Chesterfield du Cinquième ? Comment et pourquoi avez-vous commencé à écrire ce livre ? Quels sujets du livre considérez-vous comme les plus importants ?
Nathalie Ronvaux : L’envie d’écrire autre chose, de sortir d’un registre parfois un peu noir, de plonger mes personnages dans plus de douceur.
La transmission est un des sujets du livre ainsi que le vide, ou la construction/imagination par le vide.
Giedrė Pranaitytė : Quelle importance accordez-vous au français ? Pourquoi avez-vous choisi cette langue particulière pour exprimer les idées de vos œuvres littéraires ?
Nathalie Ronvaux : Le français est ma langue maternelle. J’aurais adoré écrire dans d’autres langues d’expression du pays (luxembourgeois, allemand … anglais, et autres langues maternelles), comme certains de mes collègues le font, mais je m’en sens absolument incapable.
Giedrė Pranaitytė : Quel est votre livre préféré ? Quels auteurs sont devenus pour vous une source d’inspiration?
Nathalie Ronvaux : En réalité et en toute sincérité, je suis incapable de vous répondre à cette question. Devoir citer un seul livre me rendrait probablement insomniaque pendant des jours. Certains écrivains et poètes ont bien entendu une place particulière dans ma bibliothèque et j’aime les relire, les redécouvrir, mais j’évite de les nommer, peut-être par peur d’en oublier certains, peut-être par peur d’oublier d’en découvrir d’autres.
Giedrė Pranaitytė : Quelle est la particularité du rôle des femmes dans vos romans ? Quel style et quelles caractéristiques thématiques remarquez-vous dans les œuvres des femmes écrivains ?
Nathalie Ronvaux : Elles n’ont probablement pas de caractéristiques communes. Je dirai simplement qu’elles sont présentes et qu’elles possèdent leur propre histoire en prenant un rôle actif dans mes pièces de théâtre.
Giedrė Pranaitytė : Qu’est-ce qui rend la littérature luxembourgeoise unique ? Quels écrivains sont considérés comme les représentants les plus intéressants de l’espace culturel luxembourgeois dans le monde moderne ?
Nathalie Ronvaux : Pour la littérature luxembourgeoise, je répondrais volontiers : sa créativité influencée par le multilinguisme, le métissage culturel et le fait d’être périphérique pour deux des trois langues officielles.
Giedrė Pranaitytė : Merci.